«Pèlerinage au Louvre», François Cheng, Flammarion, 2008
Au désir du beau et du ressenti:
François Cheng signe avec son 'Pèlerinage au Louvre' un livre unique et précieux qui n'effrayera pas les non-initiés aux raffinements de l'histoire de l'art. Il suffit juste de l'aimer (l'art) et d'avoir en soi ce désir et besoin de beauté, une soif du ressenti, qui pour tout dire n'a que peu à voir avec l'intelligence ou la connaissance. Ceci étant posé, posséder un peu de ces deux-là ne nuit pas. Cheng est d'ailleurs un esthète (de Chine), un académicien (de France) et un homme qui sait ce que contempler veut dire. Bref, son leitmotiv et sa démarche sont tout simples: regarder! Ensuite, imprégnez-vous de l'œuvre ainsi regardée. Seulement après, posez-vous à loisir les questions que provoque en vous la contemplation des œuvres du Louvre. Voici ce que j'aime chez Cheng: il nous emmène dans son musée, qui est à la fois réel et imaginaire, par la prolongation qu'il crée dans son esprit, et assurément dans son quotidien.
Après une longue introduction aux circonstances qui l'ont conduit à l'amour de la peinture (en partant de celui de la musique et de la calligraphie), Cheng nous entraîne dans les salles des écoles italienne, française, du Nord et enfin celles des autres écoles moins connues. Dans chacune d'entre elles, les grands noms sont évoqués, comme par exemple Vinci et sa Joconde. Un vrai piège, tant on a déjà écrit sur elle. Qu'en pense Cheng? Qu'elle est avant tout une 'présence', et qu'il y a de "l'organique, du vivant" dans ce tableau. Cheng suggère que devant elle, on est saisi par ce sens du vivant, de la célébration du beau, et finalement du mystère de la vie elle-même. Saisissement donc. Il est intéressant de noter que Cheng l'éprouve d'abord via les formes et les rythmes, avant la lumière et les ombres. Il parle d'harmonie à propos de "La brioche" de Chardin, mais reste sans voix pour la lumière et la qualité du silence 'Chardien'.
Pourtant, visiter le Louvre avec cet érudit, n'est nullement ennuyeux. Je recommande donc ce livre à l'amateur d'art, comme au néophyte, voire à toute personne souffrant d'un préjudice à l'égard des musées d'art. Et pourquoi ça? Allez, c'est très simple vraiment. Au-delà même de la qualité éditoriale du livre (belles reproductions et mise en page impeccable), je suis charmée par l'approche tranquille qu'a Cheng de la beauté. Ici, pas de fausse admiration, de pose intellectuelle, mais un regard curieux et presque amoureux pour l'art. La peinture, oui, mais par ce qu'elle suscite en nous de beau, de vivant.
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